[Précédent épisode : J1, débarquement, premiers tours de roues, lagon et nouilles chinoises]
Au menu du jour : première piste de montagne, des glaciers et une petite dose de frayeurs.
Indices pour la journée =) Indice de content au maximum
Indice de fatigue au minimum État de motivation au maximum État de la motoimpeccableça va
Après une nuit franchement bonne et une quasi grasse-mat' (plus de 10h de sommeil), petit déjeuner ! Café soluble, muesli et lait en poudre seront mon quotidien durant tout le voyage. Ça n'a pas l'air comme ça, mais j'y trouve un aspect plutôt réconfortant, allez savoir pourquoi.
Dans les objectifs du jour figurent la piste menant au Skalafellsjökull, la F985. Pourquoi ce choix ? Bigre, c'est évident, il m'a suffit de regarder la carte aux alentours de mon camping :
L'objectif sera donc d'aller boire un café là-haut. Pour le dej, j'ai malheureusement déjà avec moi des casses-dalle bien dégueu. Promis, je m'améliorerai pour les prochaies fois.
Après packetage efficace et rapide laborieux et chiant, je dirige mes roues, ou en vrai ma roue avant, en direction de la F985 sous une météo que l'on qualifiera d'Islandaise (c'est à dire qu'il pleut sans pleuvoir, fait ni froid ni chaud, nuageux mais du soleil ailleurs). Ma première piste F de mon trip. Les pistes F sont réservées aux véhicules tout-terrain. Je croise les doigts pour que mon tank et son chargement passe sans broncher. Partons donc avec Danko Jones dans les oreilles.
Petits ajustements car la caméra sous le feu avant n'a pas tenu. Sa nouvelle place (qui tiendra le coup de tous les terrains que je vais faire endurer à la bête ainsi qu'à son cavalier) : sur la crash-bar.
La piste est mi-boueuse, ce qui ne me rassure pas. Mais au fur et à mesure que je prends de l'altitude, la boue disparait...
Je comprends une fois dans ce bourbier donc que l'affichage et les avertissements au départ de la piste sur son caractère tout-terrain ne sont pas à prendre à la légère *note pour la prochaine fois...*
La route est vertigineuse. Certains virages en épingle sont piégeux car ma roue avant s'enfonce dans le gravier. En langage motard "classique", on dira que c'est pas cool du tout. Un passage est tellement pentu qu'en m'emmêlant les pinceaux avec mon sélecteur de vitesse, je me retrouve au point mort, et donc à l'arrêt. Enfin, c'est ce que j'espérais voyant ma vitesse diminuer et atteindre le 0 km/h. Or, je repars en arrière en dérapant : mon frein avant bloqué ne suffit pas à retenir mes 350kg de chargement (ma carcasse comprise). Juste après avoir encaissé une petite dose d'adrénaline (environ 1000 ans dans ma tête, une fraction de seconde en vrai), je change de pied d'appui pour freiner de l'arrière, et stoppe le tout 1m plus loin. Sauf que je m'enfonce dans le gravier et la moto est en train de chavirer par terre ! Je suis en sortie de virage serré sans visibilité, il faut que je bouge. Je réussi à récupérer le bazar, enclenche la première et repart non sans chasser de l'arrière, et m'arrête au sommet de la côte.
Ce petit passage de merde me fait réaliser trois choses :
- Ma moto est trop chargée
- Je suis un bleu pour piloter sur ce genre de terrain : leçon d'initiation en direct-live
- Tant pis, j'y suis, je continue. Mais putain je flippe pour la redescente
La frayeur de tout à l'heure a disparue, mais je ne me fais pas d'inquiétude pour elle : je sais que la retrouverai où je l'ai laissée sur le chemin du retour.
Je poursuis donc la piste sur un paysage qui devient de plus en plus minéral pour arriver à un refuge.
C'est sublime. Je suis pas le seul mais presque, cela donne un côté magique difficilement descriptible. Il y a du vent, il fait froid, on est au dessus d'une nappe de brouillard. Ajoutons à cela ma satisfaction à avoir réussi mon ascension motarde, de savoir que je vais pouvoir me poser prendre un café au chaud (car on se les pèle franchement, j'ai toutes mes couches de vêtements chauds sur moi)... En vrai, je plane un peu. Dans ma tenue de ranger de l'espace, et évidemment seul motard (comme je le serai très souvent), je me prends au jeu des selfies avec des touristes inconnus.
Les bonnes choses ayant une fin, tout comme la chaleur stockée dans mon blouson, je me dois redescendre, en bas, tout en bas, sur cette piste pleine de graviers qui descend trop.
Si j'avais la montagne face à moi à la montée, la descente face au vide est autant sublime qu'elle est flippante. Et elle est vraiment sublime. La descente se fera sur le frein moteur en 1ère pour les passages les plus vertigineux, et tout passa comme une lettre à la poste. Cela me redonnera un peu de confiance pour les pistes suivantes, et ce n'est pas inutile.
Direction Dupivogur maintenant. Mais en chemin...
Anecdote sur les routes en Islande.
- La plupart des ponts (quand ils existent, c'est à dire pas sur les pistes F sur lesquelles les rivières se traversent à gué) sont à une seule file et où on ne croise pas. La règle est simple : le premier véhicule qui est arrivé passe en premier.
- Les moutons : ils sont partout, y compris sur la route. Alors il ya des clotures dans tous les sens mais allez savoir pourquoi ils sont toujours du mauvais côté ! Les gens ont l'habitude : ils attendent. J'ai fait mes petites études statistiques : il y a ceux qui, quand ils t'entendent arriver, se poussent ; et les autres, genre les vieux briscars, qui en ont rien à foutre et qui traversent len-te-ment la route, pas perpendiculairement bien sûr.
- Combinez ces deux points, et vous avez des moutons sur les ponts à une voie, à contre-sens évidemment.
Un énième détour me mènera à un autre glacier, le Flaajökull. Il atterit dans un lac glaciaire. La végétation colorée transcende la morosité des pierres volcaniques.
J'arrive enfin à camping de Djupivogur. Il est déjà "tard", je pose mes affaires sur un emplacement, prends une douche chaude (#bonheur) et me dirige downtown en quête d'un resto. Et ouai, je me dis que je l'ai bien mérité ! Mais ce qui s'avère être des gros points sur ma carte pour représenter des villes de moyenne importance sont pour la plupart des petits villages de pécheurs, avec tout au plus deux ou trois centaines d'âmes qui y vivent. Le choix est limité : souvent un seul bar ou restaurant. Je vais donc dans THE restaurant. Le burger était sans plus, mais ils servaient de la bière, et de la vraie (alcoolique notoire, je reviendrai sur ce détail qui a son importance) ! Donc logiquement, le restaurant était topissime, il méritait 10000 étoiles sur TripAdvisor et toutes mes recommandations ! Une bière à se rouler par terre, la meilleure depuis des années. En vrai, c'était une bière bouteille, banale. Mais voilà, ma première bière depuis le bateau. Alors oui d'accord ça ne fait que 2 jours que j'ai débarqué, mais le temps est une notion relative, mvoyez.
Je peux difficilement transporter de la bière : mon chargement commence à devenir n'importe quoi, et en rapport encombrement / poids / alcool, la bière n'est franchement pas au top.
Après une douche, une bière et un burger, je n'ai bien sûr qu'une envie : me coucher ! Cette envie sera poignardée par la tente à monter avant (oui, sinon ça fait désordre).
Prochain billet : 3ème jour. Du soleil, le paradis...!